Avec cette série de photos (suivez le lien pour voir les photos), je vous emmène sur les pentes du Chaulet, au dessus des Estables, tout près du Mézenc. L’idée de ce petit article, c’est de vous raconter comment j’ai pris ces photos, les questions que je me suis posées. Cela vous aidera peut-être pour vos futures prises de vue.
Les deux idées de départ :
– Une très belle lumière ce jour-là, avec un ciel qui avait des chances de bien mettre en valeur les sujets. Au passage, quelques nuages sont souvent un atout plutôt qu’un problème.
– L’occasion. En montant au dessus des Estables, je repère les voiles de snowkite. J’étais parti pour monter au Mézenc, finalement, ce sera photos de snowkite.
Dans les photos de sport, tout est dans le placement du photographe… Se placer par rapport à la lumière, par rapport à l’arrière-plan et évidemment par rapport au sportif.
1. Se placer en fonction de la lumière. Pas de mauvaise lumière à proprement parler ce jour-là. Mais le contre-jour, c’est ce qu’on fait de mieux. Vous allez me dire : mais avec le soleil en pleine figure, la photo va être brûlée ? Ça dépend, il y a plusieurs moyens de maîtriser le contre-jour.
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- Les capteurs acceptent de plus en plus les forts écarts de lumière (c’est ce qu’on appelle la dynamique du capteur). Ce qui veut dire qu’avec un appareil récent, vous pouvez vous placer face au soleil et laisser faire l’appareil. Le capteur du D90 était bon. Celui du D800 est une merveille de dynamique.
- Travailler en RAW permet de conserver toute la dynamique du capteur. Le format RAW permet par exemple d’exposer pour ne pas avoir trop de zones brûlées (là, j’ai laissé faire l’appareil pour la mesure de la lumière, mesure matricielle donc; parfois il faut passer en mesure spot). Le post-traitement sur l’ordinateur fera le reste et permettra d’éclaircir les zones jugées trop sombres.
- Un coup de flash permet d’éclairer le sportif s’il est proche. Je ne l’ai pas utilisée ce jour-là parce que j’avais laissé le flash… dans la voiture… Mais pas de regret : sur la plupart des photos, j’étais trop loin pour qu’il y ait un effet. Le flash est utile quand on est à juste à côté du sujet (pour le petit flash intégré) et à quelques mètres (pour un flash externe de type cobra).
2. Se placer en fonction de l’arrière-plan. C’est un point qui fait vraiment la différence entre une bonne photo et une photo très quelconque. Pensez toujours à l’arrière-plan.
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- La route. Nul. Donc on évite ce jour-là toutes les photos tournées vers la route du col de la Croix de Boutières tant qu’on n’est pas un peu monté sur la pente.
- Un rideau d’arbres. Pourquoi pas. Mais bof. Vous en verrez quelques-unes dans la série. Il faut choisir où on met la voile et où on met le kiteur par rapport à ce rideau d’arbres.
- Un arrière-plan lointain. Ça permet de bien focaliser l’attention sur le kiteur.
- Le ciel. Certainement la meilleure solution ici. On a l’impression que le kiteur vole dans les airs.
Du coup, pendant la petite heure passée sur les pentes du Chaulet, j’ai fait attention à me déplacer pour tester plusieurs arrières-plans. A gauche, à droite des kiteurs, plus ou moins proches d’eux…
3. Se placer par rapport au sportif. C’est le plus important. Mais comme pour tous les sports, il faut faire très attention à la sécurité du sportif, à ne pas le gêner, et à sa propre sécurité. La sécurité c’est important évidemment. Un snowboard pris en pleine figure, ça fait des histoires à raconter à ses petits-enfants mais ce n’est peut-être pas ce qu’on recherche. Mais ne pas gêner les autres personnes, c’est tout aussi important. Il faut bien regarder leurs mouvements avant de prendre des photos ou bien connaître le sport que l’on photographie. Etre visible. Là, je suis resté une petite demi-heure en retrait, relativement discret mais visible, à prendre au téléobjectif. Puis au moment où l’un des kiteurs remontait, on s’est rapproché mutuellement, et je lui ai proposé de faire quelques passages juste au dessus de moi. J’ai sorti le grand-angle et hop… Et j’ai terminé avec quelques photos au téléobjectif. Pour ces derniers photos au télé, le ciel était plus intéressant qu’en début de séance, plus doux, avec un peu plus de nuages. J’ai alors fait attention à placer les kiteurs comme je voulais par rapport aux nuages et par rapport au sol, en attendant à chaque fois qu’ils fassent une descente dans le cadrage que j’avais prévu.
Question : mettre la voile ET le kiteur dans le cadre ou non ?
Réponse : évidemment les deux sont possibles, mon capitaine. Mais attention à faire un choix : couper le sportif ou couper la voile a bien peu de chances de donner une bonne photo. Peut-être en jouant sur des gros plans. A voir…
1. Cadrer la voile ET le kiteur.
Franchement pas facile. Parce que vue la longueur des suspentes, les deux éléments font très vite petits dans la photo, aux deux extrémités du cadre. Plusieurs moyens de s’en tirer : rechercher le moment où le kiteur fait revenir la voile vers le sol. Mais parfois le tout se confond avec le paysage. Vous verrez que c’est le cas sur les premières photos. Je me suis ensuite déplacé pour avoir le ciel en arrière-plan. Et là c’est beaucoup plus sympathique. La voile et le kiteur se voient bien et rendent même un bel effet de petitesse dans l’immensité du ciel. Vous verrez dans la série quelques photographies de ce type que j’aime beaucoup autour de la 15e place à peu près.
2. Cadrer juste la voile
Bof.
3. Juste le kiteur.
Voui mais il faut quand même qu’on voit qu’il fait du kite. Sinon c’est moins bien. Le prendre en plein saut sans la voile, ça peut être une bonne idée. Il faut choisir son arrière-plan pour le mettre en valeur. Sur quelques photos, on voit le village en fond, ça peut être une idée.
La photo que j’aime le plus ne prend que le kiteur sans la voile. C’est la photo de l’en-tête de cet article. Tout est réuni : on voit nettement les suspentes donc on comprend qu’il fait du kite. Il est de profil et correctement éclairé, avec des vêtements qui tranchent. La proportion de nuages et de ciel est intéressante et forme deux masses bien distinctes. Coup de bol, son regard est dirigé vers le haut, en train de contrôler la voile pour entamer la descente. Sauf que vue la posture et le regard, on n’a justement pas l’impression qu’il descend mais plutôt qu’il se fait tracter vers le ciel, comme une sorte d’ascenseur céleste, comme si quelqu’un… tirait les ficelles. Et le fait que l’on ne voit pas la voile renforce cette impression.
Quels réglages sur l’appareil ?
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- Priorité ouverture et f/8, on veut une bonne profondeur de champ.
- J’ai préféré figer l’action plutôt que faire du suivi. Donc dans ce cas on vérifie qu’on conserve une bonne vitesse malgré les f/8, ce qui en plein jour et en plein soleil ne devrait poser aucun problème. Là, on est autour de 1/1000e. Parfait.
- ISO bien calé au minimum (on se fait parfois avoir quand les réglages d’un autre séance sont restés. Pour éviter ça, il suffit d’activer le réglage automatique des ISO. L’appareil ne monte en ISO que si c’est nécessaire).
- Mise au point sélective. Un seul point AF dans le viseur et on focalise sur le sujet. Là, le kiteur, ou la voile, c’est selon. Très très important parce que si on laisse l’AF sur automatique, à tous les coups l’appareil va aller chercher des éléments de l’arrière-plan. On aura vaguement l’impression que le kiteur est net mais en fait pas du tout. Donc bien faire varier le point d’AF en fonction de l’endroit où est le sujet dans le cadre. Ça demande un peu d’habitude et de rapidité mais c’est nécessaire.
Pour résumer, on fait attention au choix de l’arrière-plan, au positionnement du sujet dans l’image (et à bien avoir TOUT le sujet, rien de plus moche qu’une photo où il manque une jambe, un bras, en tout cas quand on l’a pas choisi), à la netteté du sujet et à laisser évoluer tout le monde en sécurité.
Des regrets ? Oui, un. Au moment où j’ai proposé au surfeur de faire quelques passages au dessus de moi, je me suis toujours mis face à lui, en cadrant vers le haut de la pente. Ce qui fait que je n’ai que des photos où il est face à moi ou bien au dessus de moi. Pourquoi n’ai-je pas tenté des photos avec le surfeur arrivant dans mon dos ? Autrement dit cadrage vers le bas de la pente, en surveillant son approche dans mon dos du coin de l’oeil, et en le prenant juste APRES son passage au dessus de ma tête. Si l’AF a le temps d’accrocher, ou avec une focale un peu longue, ça aurait pu faire un bel effet, voir même en le prenant en filé… Bref il y a encore des photos à prendre…